A nuestras humanidades rebeldes (selección)
Traducción del francés por Paloma Vega Centeno
Texto original de Kiyémis
Edición por Alfonso Conde
Imagen: «La Marianne noire» de la AFP
Brotan raíces
La noche a mis espaldas me conduce a otros soles.
La tierra ya no otorga derecho,
debo lanzarme al frente.
Más allá del mar, el turbio horizonte.
El país natal no me imagina.
La puerta se abre, vasta como mi desgarro.
Alzan el vuelo los papeles, todo se detiene
Mi corazón teme el exilio
Mi cabeza teme el porvenir.
Vientos opuestos soplan en mi alma
El mar me traslada a las costas
en las que no me espera el estibo.
¿En qué tierra apoyar mi rostro
sentir el abrazo materno de un hogar
en que no se ponga en duda mi lugar?
¿Qué clase de guarida me protegerá
de las borrascas dispuestas a desolar
mi existencia, mi humanidad, mi integridad?
¿Entre qué brazos acurrucaré dulcemente mi ser,
descansada, nunca más descuidada, al fin,
acogida, apreciada, al fin?
En mí la nostalgia amarga
de un hogar que no conozco.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Lo he olvidado,
jamás supe.
Si mis antepasadas caminaran sobre los años,
volaran a través de los siglos,
para confiarme sus secretos,
encontrarían orejas inservibles.
Entre sí las sílabas se arrollarían, febriles
me cantarían cuentos, danzas me describirían
bufarían en un pícaro son
secretos tristemente forzados al olvido.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Lo he olvidado,
jamás supe.
Frontera auditiva y sonora,
que me separa de un territorio tan remoto
La lengua anda a tientas, terreno escarpado
Entre escollos intento trazar un camino.
Reconstruir la montaña, combatir el tiempo
a contracorriente, contienda al viento agresor,
Remar en busca de esos sonidos,
colmados de un sentido que no logro comprender.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Lo he olvidado,
jamás supe.
¡Y celebran la ausencia del saber!
El país natal desoye las músicas del otro,
Las melodías del Sur deben ser olvidadas.
Su himno escrito para atronar, su boca carente de
exotismo acentual.
Ya conoce el francés, mas el corazón ansía saber
cómo hacer danzar las palabras, e imitamos casi sin
quererlo
los movimientos de la lengua de nuestros
padres, de los que nos burlábamos,
esperando rescatar un pedazo de nuestra
historia.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Cómo hablar nyokon
lo he olvidado,
jamás supe.
Mujer negra, territorio
Mujer negra, territorio.
Regulado, descifrado, estudiado.
Mujer negra, territorio.
Mujer negra, territorio
codiciado, expropiado, encadenado,
Mujer negra, territorio.
Robado, violado, marcado
Mujer negra, territorio
eclipsado, degradado, olvidado
Mujer negra, territorio.
¿Cuidado,
conservado,
protegido,
amado…?
El cuerpo de las mujeres negras alberga miles de
historias
dramáticas y trágicas…
Y dignas, también,
Y bellas, también.
Des racines nées
La nuit dans mon dos me pousse vers d’autres
soleils.
Le sol ne donne plus de droit.
Je dois sauter devant.
Au-delà de la mer, l’horizon est trouble.
Le pays natal ne m’imagine pas.
La porte est grande ouverte, comme ma déchirure.
Les papiers s’envolent, tout s’arrête
Mon cœur craint l’exil
Ma tête craint l’avenir.
Les vents contraires soufflent dans mon âme
La mer me rejette à des côtes
Auxquelles je ne peux m’arrimer.
Sur quelle terre puis-je poser mon front
Sentir l’étreinte maternelle d’un foyer
Au sein duquel ma place ne sera pas discutée?
Quels paravents me protègeront
Des bourrasques prêtes à dévaster
Mon existence, mon humanité, mon intégrité?
Dans quels bras puis-je me blottir tendrement,
Délassée, plus délaissée, enfin,
Accueillie, appréciée, enfin?
J’ai la nostalgie amère,
D’une maison que je ne connais pas.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Si mes aïeules marchaient sur les années,
Volaient à travers les siècles,
Pour me dévoiler leurs confidences,
Elles trouveraient des oreilles inutiles.
Les syllabes se bousculeraient, fébriles
Me chanteraient des contes, me décriraient des
danse[s]
Me souffleraient d’un ton espiègle
Des secrets qui resteraient tristement effacés.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Si mes aïeules marchaient sur les années,
Volaient à travers les siècles,
Pour me dévoiler leurs confidences,
Elles trouveraient des oreilles inutiles.
Les syllabes se bousculeraient, fébriles
Me chanteraient des contes, me décriraient des
danse[s]
Me souffleraient d’un ton espiègle
Des secrets qui resteraient tristement effacés.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Frontière auditive et sonore,
Qui me sépare d’un territoire si lointain
Tâtonnant du bout des lèvres, la langue est raide
J’essaie de tracer tant bien que mal un chemin.
Reconstruire la montagne, se battre contre le temps
À contre-courant, face à des vents violents,
Ramer pour récupérer ces sons,
Plein d’un sens que je ne peux saisir.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié.
Je n’ai jamais su.
Comme est célébré cette absence de connaissance!
Le pays natal est sourd à toutes les autres
musiques,
Les mélodies des Suds doivent être oubliées,
Son hymne écrit pour être tonné, la bouche
dépourvue d’accent exotisé.
Le français est clair mais le cœur est avide de
savoir,
Comment faire danser les mots, et on imite presque
sans le vouloir,
Les mouvements de la langue de nos parents, que
l’on moquait avant
En espérant récupérer un bout de notre histoire.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Comment parler Nyokon
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Femme noire, territoire
Femme noire, territoire.
Réglementé, déchiffré, étudié,
Femme noire, territoire.
Femme noire, territoire
Convoité, exproprié, enchaîné,
Femme noire, territoire.
Volé, violé, marqué
Femme noire, territoire
Effacé, dégradé, oublié
Femme noire, territoire.
Soigné,
Préservé,
Protégé,
Aimé…?
Le corps des femmes noires, ce lieu aux milles
histoires
Dramatiques et tragiques…
Et dignes aussi,
Et belles aussi.
(Tomado de «À nos humanités revoltées» de Kiyémis, Éditions Premiers Matins de Novembre)
Des racines nées
La nuit dans mon dos me pousse vers d’autres
soleils.
Le sol ne donne plus de droit.
Je dois sauter devant.
Au-delà de la mer, l’horizon est trouble.
Le pays natal ne m’imagine pas.
La porte est grande ouverte, comme ma déchirure.
Les papiers s’envolent, tout s’arrête
Mon cœur craint l’exil
Ma tête craint l’avenir.
Les vents contraires soufflent dans mon âme
La mer me rejette à des côtes
Auxquelles je ne peux m’arrimer.
Sur quelle terre puis-je poser mon front
Sentir l’étreinte maternelle d’un foyer
Au sein duquel ma place ne sera pas discutée?
Quels paravents me protègeront
Des bourrasques prêtes à dévaster
Mon existence, mon humanité, mon intégrité?
Dans quels bras puis-je me blottir tendrement,
Délassée, plus délaissée, enfin,
Accueillie, appréciée, enfin?
J’ai la nostalgie amère,
D’une maison que je ne connais pas.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Si mes aïeules marchaient sur les années,
Volaient à travers les siècles,
Pour me dévoiler leurs confidences,
Elles trouveraient des oreilles inutiles.
Les syllabes se bousculeraient, fébriles
Me chanteraient des contes, me décriraient des
danse[s]
Me souffleraient d’un ton espiègle
Des secrets qui resteraient tristement effacés.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Frontière auditive et sonore,
Qui me sépare d’un territoire si lointain
Tâtonnant du bout des lèvres, la langue est raide
J’essaie de tracer tant bien que mal un chemin.
Reconstruire la montagne, se battre contre le temps
À contre-courant, face à des vents violents,
Ramer pour récupérer ces sons,
Plein d’un sens que je ne peux saisir.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
J’ai oublié.
Je n’ai jamais su.
Comme est célébré cette absence de connaissance!
Le pays natal est sourd à toutes les autres
musiques,
Les mélodies des Suds doivent être oubliées,
Son hymne écrit pour être tonné, la bouche
dépourvue d’accent exotisé.
Le français est clair mais le cœur est avide de
savoir,
Comment faire danser les mots, et on imite presque
sans le vouloir,
Les mouvements de la langue de nos parents, que
l’on moquait avant
En espérant récupérer un bout de notre histoire.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Comment parler Nyokon
J’ai oublié,
Je n’ai jamais su.
Femme noire, territoire
Femme noire, territoire.
Réglementé, déchiffré, étudié,
Femme noire, territoire.
Femme noire, territoire
Convoité, exproprié, enchaîné,
Femme noire, territoire.
Volé, violé, marqué
Femme noire, territoire
Effacé, dégradé, oublié
Femme noire, territoire.
Soigné,
Préservé,
Protégé,
Aimé…?
Le corps des femmes noires, ce lieu aux milles
histoires
Dramatiques et tragiques…
Et dignes aussi,
Et belles aussi.
Brotan raíces
La noche a mis espaldas me conduce a otros soles.
La tierra ya no otorga derecho,
debo lanzarme al frente.
Más allá del mar, el turbio horizonte.
El país natal no me imagina.
La puerta se abre, vasta como mi desgarro.
Alzan el vuelo los papeles, todo se detiene
Mi corazón teme el exilio
Mi cabeza teme el porvenir.
Vientos opuestos soplan en mi alma
El mar me traslada a las costas
en las que no me espera el estibo.
¿En qué tierra apoyar mi rostro
sentir el abrazo materno de un hogar
en que no se ponga en duda mi lugar?
¿Qué clase de guarida me protegerá
de las borrascas dispuestas a desolar
mi existencia, mi humanidad, mi integridad?
¿Entre qué brazos acurrucaré dulcemente mi ser,
descansada, nunca más descuidada, al fin,
acogida, apreciada, al fin?
En mí la nostalgia amarga
de un hogar que no conozco.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Lo he olvidado,
jamás supe.
Si mis antepasadas caminaran sobre los años,
volaran a través de los siglos,
para confiarme sus secretos,
encontrarían orejas inservibles.
Entre sí las sílabas se arrollarían, febriles
me cantarían cuentos, danzas me describirían
bufarían en un pícaro son
secretos tristemente forzados al olvido.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Lo he olvidado,
jamás supe.
Frontera auditiva y sonora,
que me separa de un territorio tan remoto
La lengua anda a tientas, terreno escarpado
Entre escollos intento trazar un camino.
Reconstruir la montaña, combatir el tiempo
a contracorriente, contienda al viento agresor,
Remar en busca de esos sonidos,
colmados de un sentido que no logro comprender.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Lo he olvidado,
jamás supe.
¡Y celebran la ausencia del saber!
El país natal desoye las músicas del otro,
Las melodías del Sur deben ser olvidadas.
Su himno escrito para atronar, su boca carente de
exotismo acentual.
Ya conoce el francés, mas el corazón ansía saber
cómo hacer danzar las palabras, e imitamos casi sin
quererlo
los movimientos de la lengua de nuestros
padres, de los que nos burlábamos,
esperando rescatar un pedazo de nuestra
historia.
Nmogobi feuhr akew ni Noor
Cómo hablar nyokon
lo he olvidado,
jamás supe.
Mujer negra, territorio
Mujer negra, territorio.
Regulado, descifrado, estudiado.
Mujer negra, territorio.
Mujer negra, territorio
codiciado, expropiado, encadenado,
Mujer negra, territorio.
Robado, violado, marcado
Mujer negra, territorio
eclipsado, degradado, olvidado
Mujer negra, territorio.
¿Cuidado,
conservado,
protegido,
amado…?
El cuerpo de las mujeres negras alberga miles de
historias
dramáticas y trágicas…
Y dignas, también,
Y bellas, también.
Paloma Vega Centeno nació en 1997 en Valencia. Tiene raíces zamoranas y madrileñas, pero para encontrarlas, habría que remontarse a sus abuelos. Es traductora literaria y correctora de estilo, aunque últimamente también ha ejercido como editora de novela romántica. A Paloma le interesa el feminismo interseccional y la botánica. Con todo, su pasión, huelga decirlo, siempre ha sido la literatura, y para ser exactos, la poesía, un lugar en el que confluye todo lo anterior. Desde pequeña, ha visto reflejado su fuero interno en multitud de autoras. Empezó con Gloria Fuertes y pronto descubrió a Emily Dickinson, Idea Vilariño, Sharon Olds y Audre Lorde. Su sueño es asumir, que además de traductora, es escritora. Por ello, siempre lleva consigo un cuaderno en el que apunta todo aquello que se le viene a la cabeza, con la esperanza de que, en el futuro, acabe cuajando en forma de poemario.